La
« victoire de la démocratie » tant vantée par les médias au lendemain
du cirque des présidentielles a fait long feu. Un mois et demi plus tard on a
retrouvé à l’occasion des législatives les taux massifs d’abstention auxquels
on était habitué, taux qui indiquent le décalage réel, non comblé, entre la vie
politique institutionnelle et la population.
Après
coup, c’est l’élection présidentielle qui fait figure d’exception. Il y a eu
bien entendu une grande mobilisation pour éviter une réédition du 21 avril 2002
et la présence de Le Pen au deuxième tour. Mais il y a eu surtout un grand
cirque politicien avec une campagne médiatique digne de la Star Academy, deux
candidats finalistes, des sourires et des paillettes comme on n’en avait jamais
vu. Quel fond politique sépare le PS de l’UMP ? Après un printemps
électoral dépolitisé, où la délinquance, la pédophilie et le tricolore ont occupé
le devant de la scène, on est bien en peine de le dire. Une chose est
sûre : les partis dominants ont une lourde responsabilité dans la bouillie
idéologique ambiante.
Les
transfuges opportunistes comme Besson ou Kouchner sont là pour rappeler que sur
le fond, et quoi qu’ils en disent, il n’y a bien qu’un seul projet de société
dont sont porteurs les partis bourgeois comme le PS et l’UMP. Pour les uns
comme pour les autres, il s’agit d’aller aux affaires, c’est-à-dire de gérer
loyalement le capitalisme pour le compte de ses dirigeants véritables, les
grands actionnaires des multinationales, les grands patrons de l’industrie, du
commerce, de la banque ou de l’assurance.
Maintenant
Fillon et Sarkozy s’apprêtent à lancer leurs grands chantiers. Ils ont annoncé
la couleur, peut-être un peu trop vite si l’on en croit le retour dans les
urnes du 17 juin, avec une rafale de contre-réformes libérales : le
« service minimum » c'est-à-dire la restriction du droit de grève
dans les transports publics, la TVA anti-sociale à faire payer par tout le
monde pour compenser le manque à gagner des baisses d’impôts pour les plus
riches, le démembrement de l’enseignement supérieur et de la recherche publique
par « l’autonomie des universités », l’aggravation du délire sécuritaire
avec les « peines planchers » pour les récidivistes, le
non-renouvellement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite (tant il
est vrai que les hôpitaux débordent d’infirmières, les écoles d’instituteurs,
etc.), et on en oublie. Et puis aussi, pour plus tard, un mini-traité européen
à faire passer si possible devant le Parlement, vu que par référendum la
population a déjà dit non à l’Europe libérale.
Fillon
et Sarkozy n’ont pourtant pas gagné. Ce n’est plus sur les plateaux télé mais c’est
sur le terrain des luttes sociales que les choses vont maintenant se jouer. Et
c’est à nous toutes et tous en face, travailleurs/ses, chômeurs/ses,
étudiants/es, de nous préparer, dès cet été puis à la rentrée, pour réagir aux
premières attaques et bloquer le rouleau compresseur : par la grève, par
les occupations, dans la rue.
Il faut aussi, à un autre niveau, travailler à la
construction d’un débouché social et politique à plus long terme. La
coordination des résistances et les réactions au coup par coup ne peuvent pas
suffire. Il faut préparer une offensive globale pour nous débarrasser du
capitalisme et reconstruire le monde sur d’autres bases. Toutes celles et ceux
qui veulent une société libre, autogérée, débarrassée des classes possédantes,
devraient commencer à se rassembler, échanger leurs analyses et expériences,
coordonner leurs interventions. Alors la perspective d’un autre monde possible
cessera d’être un simple slogan.