EDITO

Le capitalisme est en crise : achevons-le !

Les peuples n'ont pas attendu l’été 2007, la « crise des subprimes » et ses suites pour en baver. Reste que l’économie capitaliste est entrée en crise, et que ce sont les peuples qui les premiers en font les frais. Des Etats-Unis au Japon et à la Chine en passant par l’Europe, les travailleurs de tous les pays se retrouvent « à la rue ». Plans massifs de licenciements, annonces de chômage technique s’amoncellent dans l’automobile, la sidérurgie, le BTP et d’autres secteurs. La crise a bon dos pour virer les ouvriers. Dans l’immédiat, les patrons continuent de s’assurer leurs marges de profits : fin 2008, les dividendes versés aux actionnaires des entreprises cotées en Bourse ont augmenté par rapport à l’année précédente ! La crise n’est décidément pas la même pour tout le monde.

On entend souvent mis en cause le manque d’« éthique » du capital financier, quand il ne s’agit pas de rechercher des « coupables » de la crise, hommes d’affaires ou politiciens. Certes, dans toute l’Europe, partis et gouvernements libéraux, de gauche comme de droite, portent leur part de responsabilité : ils ont été les metteurs en scène de la libéralisation à coups de privatisations, de déréglementation des marchés, de casse du code du travail, de destruction des services publics. Quand on entend aujourd’hui les mentors du PS ou de l’UMP critiquer les outrances du libéralisme, il nous démange de leur jeter un pavé à la tête !

Mais le fond est ailleurs. Si les libéraux ont mené les politiques qu'ils ont menées, c'est parce que c'était la forme appropriée du capitalisme mondialisé. Aucune autre orientation dans le cadre du capitalisme n’était possible qui aurait permis d'éviter l’effondrement. Car la crise couve depuis le milieu des années 1970, quand les surplus de capitaux ont dû trouver des débouchés où se rentabiliser. Elle a été retardée pendant plus de trente ans par différents mécanismes : la libéralisation du commerce et de la circulation des capitaux, la marchandisation de secteurs jusque-là épargnés par le capital, des investissements massifs en Chine ou au Brésil. Ce qui a repoussé encore la chute, c’est l’endettement massif des Etats et, depuis une décennie, celui des particuliers, qui ont permis au système de « vivre à crédit ».

Les « subprimes », les « titres pourris » et autres produits financiers étranges ne sont pas l’expression des « excès » du capitalisme. Ils sont la manifestation de sa contradiction fondamentale. Le capitalisme est un système fondé sur l’exploitation du travail salarié par le capital. La course au profit tombe toujours sur une limite : il faut accroître l’exploitation du travail pour extraire plus de profits, mais on n’arrive plus alors à vendre les marchandises produites puisqu’il n’y a pas assez d’acheteurs. Le système entre alors en crise de surproduction. Et quand il est mondialisé comme aujourd’hui, la crise de surproduction est globale.

La dernière grande crise de surproduction, celle de 1929, n’a pu être résorbée que par les destruction massives de la guerre mondiale. Le capitalisme n’a pas trouvé de méthode de « régulation » autre, parce qu’il n’y en a pas. Les plans anti-crise lancés par les gouvernements ressemblent à autant de tentatives désespérées de colmater les brèches d’un vaisseau qui coule. Mais sortir de la crise n’est pas vraiment notre problème. Si le capitalisme est en crise, qu'on l'aide à crever, et qu'on passe vite à autre chose.

Les défenseurs du capitalisme ont passé un demi-siècle à créer et consolider un mythe : celui de la croissance indéfinie, du caractère inébranlable et indépassable du système, voire de sa victoire définitive contre toutes les formes de sociétés alternatives. Le mythe est en train de s’effondrer, brutalement. Aux peuples, aux travailleurs, aux chômeurs de tous les pays de construire ensemble un autre monde.