Sur la Commune
(Serge Utgé-Royo)
Tous les copains de la Commune
Ne sont pas morts sans rien laisser
Ils doivent nous garder rancune
De laisser crever leur passé.
Ils doivent nous garder rancune
De ne pas mieux en profiter…
Il était une fois, dans ce grand cimetière…
Ecoute bien l’ami, c’est une histoire vraie ;
L’gouvernement d’alors avait perdu sa guerre :
L’Etat de Prusse avait vaincu l’Etat français.
Pendant qu’on s’arrangeait entre grands de l'époque
Pour payer le tribut au premier des tueurs,
Voilà que de Paris le peuple se convoque
Et décide –comme ça !-
Qu’il ne veut plus d’supérieurs !
L’Etat de France implore son ami vainqueur
De lui donner la main pour mater « la canaille »,
Car il faut, sans tarder, aller clouer la peur
Aux cerveaux parisiens qui bravent la mitraille !
Et c’est le dix-huit mars de l’an soixante et onze
Que, depuis le palais où rota Louis (Quatorze),
M. Thiers a brandi quelques canons de bronze
Et crié vers Paris : « ils vous f’ront rendre
gorge ! »
Une fille de Paris a gueulé vers le ciel
Et laissé sa jeunesse dans un bagne pourri :
Femmes, si vous luttez, saluez Louise Michel…
Et si vous ne luttez pas…saluez-la aussi.
Aussi, souvenons-nous que des frères oubliés,
Venus d’autres pays, citoyens de la Terre,
Sont morts des mêmes balles
Que leurs frères français…
Ils avaient oublié les drapeaux, les frontières.
Notre mémoire est née de ces quelques semaines ;
Compagnons et compagnes, il faut l’utiliser :
Revendiquons les rues, les montagnes, les plaines,
Et, comme les Communards, abolissons l’armée !…
Il faut gratter l’oubli dont on a recouvert
Les leçons des copains qui furent assassinés.
Il faut savoir que l’autonomie ouvrière
A laissé dans « l’Histoire » des blessures
infectées.