(Sébastien
Faure, 1886)
Nous sommes les persécutés
De tous les temps et de toutes les guerres ;
Toujours nous fûmes exploités
Par les tyrans et leurs cerbères.
Mais nous ne voulons plus fléchir
Sous le joug qui courba nos pères,
Car nous voulons nous affranchir
De ce qui cause nos misères.
Église, parlement,
Magistrature, Etat, militarisme
Patrons et gouvernants,
Débarrassons-nous du
capitalisme.
Pressant est notre appel,
Donnons l'assaut au monde autoritaire,
Et d'un coeur fraternel,
Nous réaliserons
l'Idéal libertaire!
Ouvriers ou bien paysans,
Travailleurs de la terre ou de l'usine,
Nous sommes, dès nos jeunes ans,
Réduits au labeur qui nous mine.
D'un bout du monde à l'autre bout,
C'est nous qui créons l'abondance;
C'est nous tous qui produisons
Et nous vivons dans l'indigence.
L'Etat nous écrase d'impôts:
Il faut payer ses juges, sa flicaille;
Et si nous protestons trop haut,
Au nom de l’ordre, on nous mitraille.
Les maîtres ont changé cent fois,
C'est le jeu de la démocratie;
Quels que soient ceux qui font les lois,
C'est toujours la même supercherie.
Pour défendre les intérêts
Des flibustiers de la grande industrie,
On nous ordonne d'être prêts
A mourir pour notre patrie.
Nous ne possédons rien de rien,
Nous avons horreur de la guerre;
Voleurs, défendez votre bien,
Ce n'est pas à nous de le faire.
Déshérités, soyons amis,
Mettons un terme à nos tristes disputes.
Debout! ne soyons plus soumis,
Organisons la Grande Lutte.
Tournons le dos aux endormeurs,
Qui bercent la misère humaine,
Clouons le bec aux imposteurs
Qui sèment entre nous la haine.